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La tunique

Texte extrait du livre  » La Cavalerie de la Garde Républicaine  » du Colonel Jean-Louis Salvaldor (2007-Éditions Belin), reproduit avec l’aimable autorisation de l’auteur.

Sa plus grande qualité est l’élégance de sa coupe, son plus gros défaut est d’avoir totalement éludé un emploi estival. Et ce défaut a dû peser lourd dans le dernier changement d’uniforme de la Garde, opéré en 1980, mais décidé après la canicule de l’été 1976. Jusqu’à cette période, la tunique était confectionnée avec un solide drap satiné et comptait neuf boutons. Aussi impressionné par la chaleur étouffante qui régnait à Paris, qu’ému par le nombre de malaises lors des services d’honneur, le président de la République demanda une étude sur une nouvelle tenue.

En fait, cette nouvelle tenue ne consiste qu’à aménager l’ancienne. La tunique raccourcie de quatre centimètres, passa de neuf à sept boutons et un whipcord plus léger supplanta le drap satiné. Le képi reprit sa hauteur réglementaire de la cavalerie (120 millimètres au lieu de 110) et le pantalon retrouva une coupe fuseau, moins accentuée que nos amis anglais, mais bien définie par ses lanières de sous-pied.

Dans la rubrique « inconfort », le col et les manchettes en Celluloïd blanc remportent tous les suffrages12. De nombreux cavaliers reviennent donc au col en coton, fabriqué sur mesure et porté essentiellement à cheval. Quant aux manchettes, elles disparaissent fort heureusement dès lors que les crispins3 en buffle blanc sont portés.

Dans la rubrique « pont de détail », la bélière4 du sabre est portée avant le passant passepoilé de la tunique alors que, dans l’infanterie. Cela s’explique le plus simplement du monde: l‘armement du cavalier étant principalement le sabre, il met le sabre à la main sur ordre et devant les autorités ; de ce fait, son positionnement à l’avant plutôt qu’à l’arrière facilite ce mouvement toujours complexe puisqu’il faut décrocher et raccrocher l’anneau de fourreau au crochet de bélière sans regarder.

Dans la rubrique « curiosité », on peut se demander l’utilité de porter des boutons d’uniforme au bas des manches. Cet usage déjà ancien aurait été consacré par Napoléon Bonaparte qui voyait là la seule façon d’empêcher de s’essuyer les lèvres d’un revers de manche ou de se moucher le nez.

De même, on pense que le port de gilet d’arme, traditionnel et non réglementaire, a été imposé dès lors que les militaires déboutonnaient cette inconfortable tunique pour dévoiler des torses velus comme des ours.

Dans la rubrique « contrôles », le garde vérifie avant tout service à cheval la solidité de ses boutons où sont fixés ses aiguillettes5 et celle de ses pattes d’attente6 où reposent les trèfles7 et ses attaches de décorations. Beaucoup se souviennent encore de ce commandant de régiment grandement décoré qui eut la malchance de perdre sa « batterie de cuisine » en plein défilé ; tous les chevaux n’eurent pas le bon goût d’éviter le piétinement des ordres nationaux !

1 Réglementairement, le col mesure quatre centimètres et demi de haut, mais il n’était pas rare de voir quelques élégants dépasser allègrement les 5 cm, ce qui donne obligatoirement un port de tête altier, pour ne pas dire royal.

2 Le col est les bas de manche en plastique ont été récemment remplacés par des effets similaires en tissu.

3 Crispins : manchettes en buffle blanc protégeant les pignets et portées à la base des gants blancs.

4 Bélière : lanière de cuir noir ou blanc, longue de 30 cm et se terminant par un mousqueton en laiton, portée sur le côté gauche, permettant d’accrocher le sabre au ceinturon.

5 Aiguillettes : ornement d’uniforme fait de cordons tressés, partant de l’épaule gauche et attaché aux boutons supérieurs et avant de la tenue.

6 Pattes d’attente : morceau d’étoffe cousus sur les épaules où viennent se fixer les trèfles.

7 Trèfles : épaulettes des gardes et maréchaux des logis chefs, terminées en forme de feuille de trèfle.

8 Ponceau : de la couleur rouge vif du coquelicot.

Les premières soutaches de couleur distinctive apparaissent durant la Grande guerre sur les tenues bleu horizon de l’armée française. La gendarmerie départementale et la Garde républicaine ne commenceront à les porter sur la vareuse à col ouvert au-dessus de la grenade qu’à la veille de la Seconde guerre mondiale.

L’absence de soutaches ou de chevrons dans les attributs d’uniformes de la Garde tient à trois hypothèses.
On juge, peut-être à tort, que la Garde républicaine de Paris ne s’est plus battue en unité constituée depuis la fin de la guerre d’Espagne sous le premier Empire. Donc, on ne lui attribue pas les deux chevrons qui caractérisent les unités combattantes. Ce principe s’applique à l’ensemble des armées à de rares exceptions.

Les militaires de la Garde républicaine mobile se différencient mal de la Garde républicaine de Paris lorsqu’ils se retrouvent ensemble. Jusqu’en 1972, le galon d’élite du képi est rouge pour ces deux subdivisions. Aussi seule l’absence de soutaches à la Garde républicaine de Paris crée la distinction.

Enfin, les gardes n’auraient pas reçu les deux soutaches pour éviter la confusion avec le galon de livrée des musiciens de la fanfare ou de la musique.