ÉQUIPEMENTS

La botte

Texte extrait du livre  » La Cavalerie de la Garde Républicaine  » du Colonel Jean-Louis Salvaldor (2007-Éditions Belin), reproduit avec l’aimable autorisation de l’auteur.

« Sous-officier de présentation élégante et à la tenue toujours brillante… »


De nombreux grades républicains apprécient de lire cette phrase introductive en préambule de leur notation annuelle, même si on peut légitimement estimer que la brillance de la tenue est le corollaire de leur état. La brillance est un terme générique qui englobe tous les effets de l’uniforme, mais lorsqu’il s’agit des bottes de cavalerie, elle retrouve sa définition première : la qualité de ce qui brille, éclat lumineux. Nos amis anglais sont d’une rare performance de ce point de vue et les grandes bottes de horseguards à cuir fort impressionnent toujours le touriste à Londres, tant elles s’apparentent à des miroirs. Quand on compare les différentes unités de cavalerie européennes, on se rend compte aisément que les cavaliers de la Garde sont bien « bottés ». Leurs bottes, réalisées par une société de Limoges dont la réputation n’est plus à faire, sont de couleur noire, fabriquées à partir de mensurations précises qui avoisinent le sur-mesure et du type Saumur. Un marché public établi avec la Direction générale de la Gendarmerie garantit les conditions et les délais de fabrication. Il suffit à leur nouveau propriétaire de la faire « casser » et de les équiper de taquets pour éperons avant de les porter. À leur arrivée au régiment, officiers et sous-officiers reçoivent deux paires de bottes, ce qui leur permet d’assurer le quotidien, mais se révèle très vite insuffisant. Ils cassent parfois leur tirelire, pour se faire confectionner une paire de bottes entièrement sur mesure par un maître bottier et la paire d’embauchoirs (appelés également formes) qui ne va plus les quitter. Tous les bottiers le disent a volo : l’embauchoir c’est la moitié de la vie de la botte et l’unique moyen d’assurer sa longévité. Il faut donc consentir à cet investissement en étant persuadé qu’il sera à long terme. Mais cette logique n’est pas celle de la majorité des cavalières et cavaliers qui privilégient le port de jodhpurs et de mini-chaps, plus pratiques et moins onéreux.

Faire « casser » ses bottes

N’imaginez pas chausser vos belles bottes neuves sans les faire casser, elles s’adapteraient à votre morphologie et à votre façon de marcher et présenteraient des plis disgracieux et
inadaptés. Vous devez donc les faire casser.
Deux techniques sont utilisées à la Garde :

  • Les bottes sont confiées à nos maîtres selliers ; une fois le cuir humidifié, elles sont cassées en un double pli vers l’avant et vers l’arrière formant un X caractéristique (ce pli était autrefois maintenu avec des épingles à linge en bois, le temps du séchage).

  • Les bottes sont portées et cassées au pied par un maître de manège expérimenté. Les mains de l’artiste sont placées de part et d’autre de la botte, les pouces à hauteur du trèfle, et l’on demande au cavalier de se pencher successivement à l’avant et à l’arrière. Une fois certain que le pli est bien marqué, le cavalier retire ses bottes et la finition est assurée à la main. Cette opération a généralement pour conséquence d’abaisser la hauteur de la tige d’environ deux centimètres. Voilà pourquoi les maîtres bottiers majorent toujours les hauteurs de tige afin de conserver la bonne longueur une fois la botte utilisée régulièrement et le talon bien descendu.

Les taquets d’éperon

Ces deux petits bouts placés à l’arrière de la botte peuvent paraître bien
dérisoires, pourtant, leur emplacement conditionne la stabilité de l’éperon et
donc l’action des jambes ; c’est dire l’intérêt qu’y accordent les cavaliers.
Deux types de taquets équipent les bottes de la Garde républicaine :

  • Un taquet maison, réalisé par le sellier, formé par un bout de cuir
    replié sur lui-même en escargot et cousu à travers la totalité de la tige.
    Il est posé sur mesure avec son éperon à la hauteur de la malléole du cavalier, ce
    qui permet de confectionner simultanément la lanière sous-pied en cuir maintenue d’un bouton à l’autre.
  • Un taquet « civil », réalisé en cuir fort et en forme de triangle, dont l’une des pointe est dirigée vers le talon. La difficulté du bottier consiste à assurer sa solidité puisqu’il faut le coudre entièrement sur la botte.

La Garde n’a pas toujours porté cette botte classique de coupe
Saumur. Jusqu’en 1945, elle était équipée de bottes à la Condé,
c’est-à-dire réhaussée par un chaudron dont on devine l’effet
protecteur pour les genoux. On peut supposer que, une fois encore,
le coût de réalisation d’un effet militaire a pris le pas sur son
élégance. En effet, la botte était confectionnée d’une seule pièce
de cuir, des hauts du chaudron au coup de pied. Si les horseguards
les ont sauvegardées à Londres, seuls les veneurs français ont
maintenu cette tradition.

Le trompette OTT sonnant le cessez-le-feu le 22 août 1945 à Paris
On remarquera ses bottes à chaudron.